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      Où l’herbe ne pousse plus
      Le roman retrouvé d'Oradour
      de Georges Magnane

      Préface de Pascal Plas et Thomas Bauer
      Illustrations de couverture : Roland Cat (1ère) et Antoine Quaresma (4e)
      1ère édition :  1953
      Réédition : 31 mars 2016
      Format 150 x 210, 280 p.
      ISBN : 978-2-916512-30-3
      Prix : 21 €

      présentation de l'ouvrage
       
       



       
       
       

             
            Préface

            de Pascal Plas, historien de la gestion des conflits, et Thomas Bauer, spécialiste de langue et littérature française, tous deux de l’Université de Limoges. 

            Quelques extraits : 
            Où l’herbe ne pousse plus raconte la journée du 10 juin 1944 à Oradour-sur-Glane où le personnage principal, un paysan d’un village proche du bourg, est le seul rescapé de sa famille. Quant au massacre en lui-même, il est présenté par divers personnages secondaires, hommes, femmes et enfants, ainsi que deux officiers allemands. Même si l’histoire est tirée d’un fait réel, aucun nom réel n’est donné dans le récit. Georges Magnane prend d’ailleurs le soin, en préambule, d’ajouter cette petite note : « Les circonstances de ce récit appartiennent à l’Histoire mais il serait vain d’identifier les personnages. Que le lecteur veuille donc considérer les victimes du massacre ici évoqué simplement comme d’authentiques villageois ». Oradour n’est d’ailleurs jamais évoqué. C’est  “Verrièges“ qui, dans le roman, va être encerclé par les SS. Georges Magnane s’en est expliqué : « Oradour devient Verrièges dans ce livre et l’on n’y trouve ni les Hyvernaud, ni les Poutaraud, ni les Rouffanche, ni aucun véritable nom. Les noms que j’ai mis à la place, moi Limousin, sont aussi limousins que les vrais, et d’ailleurs sont aussi familiers aux oreilles de tout autre Limousin. Mais ce ne sont pas les mêmes. » Bref, ni roman à clé, ni roman à thèse, Où l’herbe ne pousse plus n’en demeure pas moins un témoignage réaliste et bouleversant. 
            Bien qu’il soit découpé en sept parties – « sept » étant un chiffre symbolique pour le maître franc-maçon qu’était alors Georges Magnane –, le roman est construit en diptyque, un modèle binaire en somme qui lui permet d’organiser son propos : le passage de la vie à la mort, du blanc au noir, de l’avant à l’après. Un premier volet, très long et peu mouvementé, pose en effet le cadre du récit et présente de façon détaillée les personnages et les lieux. Il croque avec précision le Limousin, sa géographie, sa topographie, sa paysannerie – comme c’est le cas dans d’autres romans tel Gerbe Baude –, et montre la façon dont cette région peut être perçue de l’extérieur. Il s’agit pour Georges Magnane de décrire avec réalisme les habitants de Verrièges dans leur vie mais aussi dans leur piège. En ce jour dramatique qui n’en finit pas et dont l’issue semble d’avance fatale, les habitants qui ont été regroupés par les soldats sont dans l’attente. L’auteur décrit alors avec minutie la chronologie des événements à travers le point de vue des différents personnages, qu’ils soient villageois ou bourreaux. Certains habitants sont angoissés tout de suite alors que d’autres semblent ne pas comprendre ce qui se passe ou ne semblent pas croire à une fin inéluctable. Un second volet, plus court, présente l’accélération du drame et Magnane, en fin psychologue, parvient à décrire avec justesse les postures, attitudes et sentiments. Il permet au lecteur, littéralement saisi par l’écriture, d’entrer dans leur intimité. Puis, tout s’enchaîne rapidement, tout s’embrase, tout se désunit(…)
             En écrivant ce roman, écrivent les préfaciers, l’auteur  voulait prendre le contre-pied du procès de Bordeaux qui se tint en 1953 et fut, selon lui, « le procès de l’absence », c’est-à-dire de l’oubli, comme il l’écrivit alors dans Les Lettres françaises le 29 janvier 1953. « C’est au nom des vivants que j’ai pris la parole. Pour moi, explique-t-il, les victimes d’Oradour et d’autres lieux de supplice vivent encore. Et pour les aider à vivre dans la mémoire des hommes, j’ai fait ce que j’ai pu, je le ferai encore. » Ce roman est donc pour Georges Magnane une sorte de devoir moral et la fiction était un choix raisonné « d’expérience littéraire », plus propre, selon lui, à rendre compte du drame que ce qu’il nommait la « pseudo histoire » – un récit fortement documenté tel qu’en faisaient alors les journalistes – ou bien le recueil de témoignages par ailleurs considéré comme nécessaire, mais insuffisant pour conduire le lecteur au cœur du drame.
            Pour écrire son roman, Georges Magnane a pu consulter des rapports et des pièces officielles publiées à l’époque, des témoignages livrés au public sous forme de brochures, des discours et articles de presse fort nombreux, des ouvrages à forte connotation religieuse mais qui n’en contenaient pas moins des éléments historiques propres à étayer son récit, sans compter les monographies historiques encore peu charpentées à l’image de celle de Franck Delage : Oradour, ville martyre (1945). Si l’on ajoute les récits oraux qui circulaient alors et les articles de presse se rapportant aux polémiques politiques nées de la Guerre Froide, et dans lesquelles Oradour était cité en exemple, Georges Magnane était en mesure d’obtenir une documentation suffisamment large pour construire la trame historique de son œuvre.
            Mais, le problème se pose toujours aux familles meurtries, peut-on écrire un roman sur un tel drame ? P. Plas et T. Bauer répondent : 
            En cela, on est au cœur de ce que peut apporter la littérature à l’Histoire. Le roman devient une source historique de renseignements précieux et utiles, une « force supplétive » comme le dirait Patrick Boucheron, pour approcher l’histoire d’Oradour. À défaut de dire l’histoire, la fiction est capable « de la dire autrement en lui posant les questions décisives » explique même l’historienne Mona Ozouf. Nous pouvons en définitive considérer ce texte comme une véritable réussite tant Georges Magnane connaissait bien le petit monde des campagnes limousines, les victimes, et avait l’intuition de ce qu’était réellement le nazisme. Pour Oradour, ce type d’ouvrage venait trop tôt par rapport à la spécificité même du drame et à la nécessité du silence, que seuls quelques ouvrages à caractère mémoriel ou commémoratif ont pu rompre. 
             Ce roman constitue par conséquent un « acte littéraire » d’une grande qualité et, qui plus est, un acte courageux ! Sans compter qu’il est toujours d’actualité dans la mesure où il représente la seule fiction globale sur Oradour, non à partir d’Oradour, et l’archétype d’une prime fiction sur les horreurs de la guerre.
             
             


       


       
       
       
       
       
       
       
       
       
       
       
       



       
       
       
       
       
       
       
       
       
       

         

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